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25 novembre 2007

Les fileuses de destin

Le "ventre rond", les "belles gambettes", et le "moignon" sont les trois parques qui tissent le destin entre Saïgon aux prises avec ses guerres et ses misères  et la vie franchement opulente de la grande métropole moderne où les trois filles ont su échapper aux régimes et misères des assauts communistes.
       Trois filles attablées un dimanche dans une cuisine "flambant neuve"  dont s'échappent les mille et une odeurs héritées des recettes de la grand-mère vietnamienne qui distillent encore dans la mémoire des soeurettes toute sa culture orientale les reliant au vieillard abandonné il y a vingt ans dans la ville de SaÏgon.
          Autour de la table : - "le moignon", oiseau de mauvaise augure  écorché par une ancienne histoire d'amour interdite, qui lit, en trame de fond, le livre laissé là jadis par le vieillard abandonné, - la belle gambette  s'emmêlant les pinceaux dans ses histoires d'amour et de gambettes, - et enfin la soeur aînée gardienne de la langue "paternelle" oubliée par les deux autres plus jeunes et qui couve paresseusement sa future progéniture des projets les plus rutilants de la civilisation occidentale.
Il leur reste à montrer au vieux roi Lear les trésors inaccessibles du monde  : lui donner la mesure de ce qu'elles sont parvenu à ériger... en l'invitant à son dernier voyage à l'autre bout du monde.


      A travers une prose capricante, les images sautillant d'une phrase à l'autre, on est subjugué par la vitalité et l'intrépidité des formules en tout genre qui bondissent à travers un texte, qui cache en filigranes la cruauté d'un destin et l'amertume des souvenirs d'une culture et d'un passé presque abandonnés au profit de l'abondance et de l'opulence matérialiste occidentale.
        Si le texte est riche, il reste cependant aux néophytes comme moi à prendre leur dictionnaire, quitte à rompre quelque peu l'allégresse du roman, car chaque phrase regorge de vocabulaire inhabituel et de surcroît souvent utilisé dans des sens métaphoriques de deuxième degré.
Si l'on ne se laisse pas décourager par ce détail, on pourra même relire avec délices ce petit ovni acidulé, frais et piquant, et qui vous laisse comme une amertume au fond de la bouche, celle du destin impitoyable, inexorable, tissé par les trois Parques.

Les Trois Parques de Linda Lê chez Christian Bourgeois Editeur

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